Autonomisation des filles ayant connu une situation de rue : l’ASBL LBM pose les jalons ! Filles de la rue d’hier, femmes autonomes et entrepreneuses de demain ! Tel est le vœu de Ndako Ya Biso par son ASBL Lisango mpo ya Bokolisi Mboka (LBM). L’occasion faisant le larron, l’ASBL a saisi la célébration de la journée internationale des droits de la femme pour sensibiliser les filles à leur autonomisation. Trois moments de sensibilisation ont été organisés : pour les filles en situation de rue (6 à 14 ans), pour les grandes filles en situation de rue (18 à 30 ans) et pour les jeunes filles ayant connu la rue et actuellement accompagnées dans l’entreprenariat.
- FEMME VENANT DE LA RUE ET ENTREPRENEURE, EST-CE POSSIBLE ?
Rapport du WE des jeunes femmes venant de la rue accompagnées en insertion professionnelle organisée du 4 au 5 Mars 2023, à Menkao.
En marge de la journée internationale des droits de la femme, un week-end a été organisé du 4 au 5 mars 2023, à l’intention exclusivement des jeunes filles de la maison d’insertion socio-professionnelle des jeunes, NDAKO YA ELIKYA. En effet, nous avons constaté un déficit de connaissances en matière de sexualité des filles entrepreneures, déficit qui s’est manifesté par de nombreuses grossesses non désirées.
Cette situation conduit souvent ces jeunes femmes à laisser tomber leur petite entreprise, au moment même où elles sont en train de se mettre sur le marché, et la faillite s’en suit souvent.
Nous avons invité Madame EMILIE LINONO, une infirmière expérimentée dans l’accompagnement des jeunes, qui s’est jointe à notre équipe d’insertion professionnelle. Madame Liliane MATUMONA, responsable de la coupe et couture au CFP Saint Joseph était des nôtres également.
Sur les 30 jeunes filles régulièrement suivies par la maison de l’insertion, seulement 16 ont répondu à l’invitation. Certaines autres avaient des commandes de robes, liées à la journée de la femme du 08 Mars et d’autres encore étaient retenues chez elles pour des raisons de rumeurs d’insécurité dans la région de MENKAO. Au niveau de l’équipe nous avons compris que notre communication avec elles devait être renforcée et nous pensons ouvrir un groupe whatsapp pour elles.
Arrivées dans ce lieu calme de Menkao, loin des bruits de la ville, les filles étaient heureuses de se retrouver dans un endroit paisible et détendant. Nous leur avons expliqué les objectifs et le calendrier du WE puis nous avons pris ensemble le repas du soir et avons partagé la prière.
Après une bonne nuit de repos paisible, les filles ont été heureuses de partager ensemble leur petit déjeuner. Ensuite nous avons suivi un exposé sur la vie sexuelle animé par Mme EMILIE, une séance très mouvementée par de nombreuses questions étalées au grand jour et qui ont prouvé leur méconnaissance sur le sujet. Cela a permis aux jeunes de partager en petits groupes sur leurs peurs dans leurs relations avec les garçons et les dispositions qu’elles comptent prendre pour sauver leurs entreprises.
Il ressort des groupes de partage que les filles ont souvent peur d’être rejetées par les garçons si elles résistent à leurs demandes. Elles se laissent faire sans savoir comment prendre leurs précautions. Mais elles ont peur d’une grossesse en se donnant aux garçons. Elles ont aussi peur de leurs familles qui ne voient pas de bon œil leurs relations avec des garçons.
Concernant les dispositions à prendre pour sauver leurs entreprises, elles ont proposé de faire la part des choses entre les affaires et l’amour. C’est-à-dire être professionnelle pendant et sur le lieu de travail et mettre en pratique les différentes méthodes de contraception pour éviter les grossesses non désirées. Beaucoup ont parlé de la joie de découvrir des méthodes contraceptives qu’elles ignoraient en se connaissant davantage.
Dimanche, nous avons partagé ensemble une célébration axée sur l’évangile des Talents, mettant l‘accent sur celui que chacune a reçu du Seigneur. Chacune est invitée à le mettre en valeur, avec toute sa force et sa dignité retrouvée.
A la fin du week-end, les filles étaient très satisfaites : c’est un sujet qu’elles n’ont jamais débattu avec une spécialiste. Celle-ci n’a évité aucune question. Les filles étaient contentes de la qualité du lieu, des intervenants, des repas. Elles ont participé activement aux différentes activités et services.
Roger Abbeba, Educateur
2. Autonomiser la femme tout en gardant sa dignité !
Dans la matinée du 8 mars 2023, 58 grandes filles (18 à 30 ans) accompagnées par la maison d’écoute des grands jeunes se sont retrouvées dans la salle paroissiale de Sainte Christine pour la célébration de la journée internationale des droits de la femme. La rencontre était animée par madame Stéphanie Mbelu, Psychologvue flying de Louvain Coopération. L’autonomisation de la femme, a-t-elle expliqué, est définie comme l’élargissement de la capacité d’une personne à opérer des choix de vie stratégiques -sachant que cette capacité lui a été refusée antérieurement-.
L’intervenante a aidé les jeunes à comprendre ce que signifie « se prendre en charge » par une pièce théâtrale exécutée par les jeunes elles-mêmes. L’objectif était de les amener à établir la différence entre la vie en famille quand les parents sont ou ne sont pas en mesure de prendre en charge leur progéniture.
Après cette pièce théâtrale, 4 groupes de réflexion ont été formés. Chaque groupe devait répondre à trois questions posées par l’intervenante :
1- Nommer votre groupe de réflexion.
2-L’autonomisation de la femme est- elle possible ?
3- Comment la femme peut être autonome ?
Ces trois questions ont aidé les jeunes à comprendre qu’elles ont une valeur et qu’elles sont capables de devenir autonome.
Voici les réponses de chaque groupe :
- Groupe 1 « sauver la femme » : L’autonomisation de la femme est possible. Elle doit travailler, faire une formation dans un domaine précis. Elle peut aussi vendre quelque chose et garder sa dignité tout en se respectant.
- Groupe 2 « Basi ya lokumu » (femme de valeur) : Une femme est capable de se prendre en charge à travers son travail. Elle peut devenir journaliste, policière, danseuse, vendre et faire des voyages dans le monde entier.
- Groupe 3 « Maman ya Dubai » (femmes d’affaires) : L’autonomisation en devenant commerçante, en voyageant pour gagner la vie, en devenant femme de ménage. Elle est capable de faire une formation pour pouvoir se prendre en charge, louer une maison et surtout, valoriser son travail.
- Groupe 4 Mwasi ya Makasi (femme forte) : Une femme forte doit montrer ses talents. Elle doit se faire respecter à travers son comportement, son habillement et sa façon de parler. Elle doit étudier pour devenir autonome.
Et après la réflexion en groupe, la deuxième partie de la pièce montrait comment la vie devient simple et belle quand on a une source de revenu indépendante.
L’intervenante du jour a estimé qu’elles avaient de belles idées mais que c’était la détermination qui manque. « Il est temps de prendre les choses au sérieux et avec conscience », a indiqué la Psychologue.
Pour finir, elle les a invitées à énumérer les activités qui valorisent une femme et celles qui la dévalorisent. Voici les réponses de jeunes :
- Valorisation : la coupe et couture, l’esthétique, journalisme, éducateur, professeur, …
- Dévalorisation : la prostitution, la mendicité, le vol,…
« La femme gardera sa dignité tout en restant elle-même c’est-à-dire, faire quelque chose ou un travail qui est de sa compétence pour son autonomisation. Si la femme arrive à se prendre en charge, elle ne perdra pas sa dignité. Elle doit aussi oublier son passé qui l’accable et préparer le futur », a indiqué l’intervenante du jour avant de lancer un vibrant appel aux grandes jeunes de la rue : « Femme, réveille-toi pour donner le meilleur toi-même ! ».
Après l’intervention de Me Stéphanie, la jeune Ruth Munzangu, une ancienne de la rue devenue autonome grâce à son travail, a donné son témoignage. Ruth a vécu dans une famille pauvre et elle était obligée de se prostituer pour la survie de sa petite famille. Elle a deux enfants et deux autres de sa défunte sœur, à sa charge. Elle a bénéficié de l’accompagnement psychosocial de la part de la maison d’écoute de Ndako Ya Biso et a effectué une formation en coupe et couture. Aujourd’hui, elle est responsable d’un atelier et fait des ventes ambulantes de robes à Mariano.
Bibiane Kabena, Educatrice sociale
3. S’investir pour l’autonomisation des filles en situation de rue !
Les filles en situation de rue dont l’âge varie entre 6 et 14 ans hébergées au centre Ndako Ya Biso Filles ont été sensibilisées, à leur tour, sur leurs droits à travers une causerie éducative.
Mercredi 08 mars 2023. Dès 13h30, la cour du centre d’hébergement des filles était bien aménagée pour accueillir cette causerie éducative spéciale, car placée sous le signe du Gender. Sous le manguier du centre, éducatrices, éducateurs et filles se sont donné rendez-vous pour échanger sur la question de droits des femmes.
« Dans le temps, les femmes ont lutté pour obtenir les droits. Aujourd’hui, notre génération en bénéficie. Nous devons nous aussi nous engager pour plus de droits en commençant par le plus basique, celui d’avoir une famille ». C’est en ces termes que la journée a été introduite par l’administratrice de l’ASBL LBM.
A travers une pièce de théâtre, les filles hébergées au centre Ndako Ya Biso ont montré le bien-fondé d’accorder les mêmes chances aux filles qu’aux garçons dans leur éducation et leur formation. Elles ont fustigé la discrimination des filles dans les familles et milieu scolaire et, encouragé les adultes à s’investir pour l’autonomisation des filles surtout celles en situation de rue.
Prenant la parole à tour de rôle, les éducatrices ont encouragé les filles à s’intéresser aux études et à l’évolution de la technologie. Les filles, femmes de demain, doivent se former pour se distinguer dans la société. « On peut être femme de ménage ou bureaucrate ou encore commerçante, entrepreneuse. Ce qui importe, c’est ce qu’on a dans la tête et ce qu’on peut en faire pour transformer notre milieu de vie ». La vie, a souligné une éducatrice, est une page vierge et, chacune doit écrire son histoire, faire de dessins et formes qui lui donne de la valeur. « Le 8 mars reste une journée de célébration mais aussi de relecture des efforts consentis pour y arriver et d’engagement pour la poursuite de la lutte contre la discrimination des femmes », a renchéri le Directeur financier de l’ASBL qui a marqué de sa présence cette journée.
Encouragées par les adultes, les filles se sont engagées à prendre-à-bras-le corps cette lutte en quittant la rue pour reconstruire leur vie. Pour leur part, les éducatrices et éducateurs ont réaffirmé leur volonté d’assurer un accompagnement psychosocial de qualité pour la réinsertion sociale de ces filles.
La causerie éducative s’est clôturée dans une belle ambiance. Le repas apprêté par les cuisinières a été servi par quelques hommes de l’association venus honorer la gent féminine. !
Laetitia Mbuyi, Administratrice LBM