LES OUTILS DE STABILISATION DES ENFANTS RÉUNIFIÉS DANS LEUR FAMILLE

La réunification familiale de l’enfant n’est pas un objectif final, elle n’est qu’un moment dans un cheminement qui doit conduire à une réconciliation et à une autonomisation de la famille. Si l’éducateur ne prend pas le temps de travailler à l’unité de la famille, il peut être assuré d’un grand nombre d’échecs puisque la situation familiale n’a pas évolué.

JP Godding et A Mushiete, Méthodologie de l’Accompagnement des Enfants de la Rue à Kinshasa

1er OUTIL : LES VISITES EN FAMILLE 

Lors de la visite en famille l’éducateur doit être d’abord attentif à l’enfant pour s’assurer qu’il n’ait pas rechuté. Il parle avec lui pour connaitre ses activités, ses projets, ses joies et ses soucis… Il vérifie également comment se passent ses relations avec les membres de sa famille, ses proches dans la parcelle et dans le quartier ? Se sent-il accueilli et en sécurité ?

Il s’entretient aussi avec les membres de la famille de leurs soucis : la famille arrive-t-elle à survivre ? Rencontre-t-elle des difficultés particulières ?

2e OUTIL : LA SCOLARISATION DE L’ENFANT

La plupart des jeunes enfants sont motivés par l’école : retrouver son uniforme scolaire pour un enfant, c’est comme retrouver sa dignité, c’est retrouver l’assurance qu’il est redevenu un enfant comme les autres.

Lors de ses visites de suivi dans les écoles, l’éducateur évalue l’évolution de l’enfant à travers ses attitudes, sa propreté, sa politesse, etc. Il examine avec l’enfant si celui-ci est satisfait de sa classe et de sa formation, s’il rencontre des problèmes et lesquels.

Il vérifiera aussi l’implication de la famille dans le suivi scolaire de l’enfant : la réussite de la scolarisation en dépend.

3èmeOUTIL : LA FORMATION PROFESSIONNELLE

Sauf exception, nous proposons aux jeunes de plus de 15 ans de passer en formation professionnelle.

  • Avant la formation : c’est l’étape de la motivation du jeune et de sa famille ainsi que le choix d’une orientation. Il s’agit de rendre au jeune une image positive de lui-même.
  • Durant la formation : le suivi de la qualité de la formation et de la régularité du jeune.
  • Après la formation : l’appui à l’insertion professionnelle dans une ville où il n’existe que très peu d’opportunités dans le secteur formel et où le plus grand nombre doivent être formés pour se débrouiller dans le secteur informel.

4e OUTIL : LES AIDES PONCTUELLES

Lors des démarches en vue de la réunification familiale l’éducateur vérifie également les conditions d’accueil de l’enfant. Beaucoup d’enfants sont dans la rue principalement à cause de la misère dans leur famille : non seulement la famille n’a plus les moyens de prendre en charge leur scolarité, mais il n’y a rien à manger et chaque membre de la famille doit se débrouiller tout seul.

En principe, nous refusons un quelconque appui direct aux familles des enfants réunifiés pour éviter tout chemin de dépendance. Toute aide donnée peut conduire une famille à penser qu’elle pourra encore en recevoir une autre ensuite. C’est pour cela que nous privilégions l’octroi d’un microcrédit en vue de rendre leur autonomie aux familles.

Mais, dans certains cas, la misère est totale : le papa a disparu, la maman est seule et sans ressource, ou bien c’est une grand-mère invalide qui prend en charge les enfants et, si l’enfant réunifié se retrouve dans ce cadre de misère totale, il ne tiendra pas deux jours avant de retourner dans la rue.

5e OUTIL : L’OCTROI D’UN MICROCRÉDIT

Un enfant qui est descendu dans la rue à cause de la misère de la famille ne restera pas dans sa famille si la situation de misère n’a pas changé.

Parmi les outils de stabilisation des enfants réunifiés, le microcrédit accordé à la maman responsable de l’enfant est un élément clé. Ce microcrédit fournit à la maman les moyens de commencer, de reprendre ou de développer une petite activité génératrice de revenus. Cela lui permettra de subvenir aux besoins de ses enfants et d’améliorer les conditions de vie de sa famille.

Après l’étude du projet de la maman et une petite formation, un crédit est attribué. Le premier montant est de 40 $ et, si le remboursement est régulier, un nouveau crédit d’un montant de 50 $ à 100 $ maximum peut être octroyé. La maman pourra régulièrement renouveler son microcrédit pendant la période de stabilisation de trois ans de l’enfant.

6e OUTIL : L’OCTROI D’UNE GARANTIE LOCATIVE

L’éducateur peut constater que l’enfant ne pourra pas tenir dans les conditions de survie de la famille. Soit le logement familial est trop petit pour une famille de plusieurs enfants, soit le logement est insalubre, ou sujet à des inondations régulières ; ou alors l’enfant est rejeté par les voisins du quartier.

Dans certains cas, les familles peuvent trouver le loyer mensuel (20 $ à 30 $), mais ne peuvent pas assumer la garantie locative de six à dix mois de loyer que le propriétaire leur demande, et donc restent bloquées dans un logement insalubre.

Cet outil a été mis au point pour favoriser la réunification familiale et la stabilisation de l’enfant dans sa famille. La garantie locative est versée directement au propriétaire du logement. Son plafond est actuellement de 150 $, elle n’est pas un crédit, mais un appui direct de notre structure.

7e OUTIL : LES RENCONTRES PARENTS-PARENTS

L’expérience nous a montré que les familles ont besoin de savoir qu’elles ne sont pas les seules à rencontrer ces problèmes dans Kinshasa aujourd’hui. La rencontre avec d’autres familles dans la même situation redonne courage à la famille, et l’échange des expériences vient renforcer les capacités des familles et leur montrer que quelque chose d’autre est possible. Le témoignage de l’expérience réussie de réintégration d’un enfant dans une famille peut vraiment encourager les autres familles. En ce sens, les rencontres parents-parents sont un outil important de stabilisation d’un enfant.